Il pourrait être dit qu’Eric Tabuchi a débuté sa carrière artistique par la photographie. Pourraient être évoqués les kilomètres qu’il a parcourus le long de routes nationales progressivement délaissées au profit d’autoroutes plus fonctionnelles. Ce réseau
« alternatif » – celui des itinéraires bis – constitue sa réserve naturelle. à la façon d’un naturaliste, il a porté son regard sur des constructions abandonnées et sur les petites révolutions d’ordre fonctionnel dont elles ont parfois fait l’objet (stations essence converties en commerces divers, bâtiments industriels devenus restaurants exotiques). Il s’est également attaché à certains particularismes récurrents du paysage (skate parks ruraux).

Ces formes collectées sont autant de manifestations de l’itinérance et de l’instable. L’analogie certes aisée à l’instantané photographique ne suffirait pas à circonscrire les images accumulées depuis plus dix ans. Au transitoire de certaines mutations sociales (congés payés, désertion rurale) et aux espaces interstitiels qu’elles engendrent, correspondent les œuvres d’un atelier aux dimensions d’un territoire. Pour son exposition au Palais de Tokyo, malmenant des logiques propres à l’usage, au langage ou à la représentation, jouant des échelles et des analogies, opposant plan et volume, surface et espace, Eric Tabuchi reconfigure le réel pour mieux en extraire les dimensions absurdes ou étranges, plastiques ou politiques.